Les gens qu'on aime : Donald Fagen

Non, nous ne sommes pas des amis parfaits. Par négligence, il nous arrive de perdre le contact avec les meilleurs des compagnons, parce que nous ne leur consacrons pas le temps nécessaire au bon moment, parce que nous faisons autre chose, parce que nous galopons au lieu de flâner ou parce que cela demande un petit effort, et que nous sommes faibles. Puis, quand le temps écoulé sans visite devient trop important, la honte nous empêche de reparaître en disant simplement bonjour. Nous cherchons alors des prétextes, nous nous maquillons, nous attendons le bon moment, qui ne vient pas. Nous échafaudons des plans pour pouvoir faire comme si de rien n’était. Peine perdue : nous cherchons la formule magique là où la plus grande simplicité serait requise. Et nous remettons au lendemain, puis au lendemain. Souvent, à court d’idées géniales mais enfin décidés, nous choisissons l’occasion la plus « tarte » pour repointer notre museau : une fête, la saint-machin, un anniversaire. Au fond, est-ce que les anniversaires ne sont pas faits aussi pour ça, retrouver les gens qu’on aime ?... Non, nous ne sommes pas des amis parfaits, mais qui nous le demande ? Nous choisirons donc ces prétextes grossiers, les anniversaires, pour parler ici de ceux qui nous sont chers ou simplement les évoquer. Faire connaître, rappeler, signaler leurs présences. Ce 10 janvier 2013, commençons donc par célébrer les 65 ans de Donald Fagen, l’orfèvre discret du jazz-funk, le plus mal fagoté des princes de l’élégance. Plutôt que d’en parler, écoutons-le. Un morceau emblématique, daté de 1982, résume à mon avis très bien l’art du bonhomme, Maxine. (Précisions d’emblée que le traitement de la batterie est le seul « défaut » de ce petit chef-d’œuvre, un détail qui rappelle le défaut majeur et général des années 80). Passons donc sur le son de la batterie pour nous régaler du meilleur, la mélodie, l’arrangement fascinant des chœurs, la grâce harmonique. Et en passant, le saxophone de Mickael Brecker…

  

 Comme un chroniqueur américain l’a récemment remarqué, la différence entre les vieux rockers du genre des Stones et les dinosaures du calibre de Fagen, c’est que les premiers ont bâti leur gloire sur un public d’adolescents, avec des chansons qui s’adressaient à eux, avec leurs mots. Quand vous n’êtes plus adolescent vous-mêmes (pour peu que vous soyez anglophone), les love me, hold me, I wanna love you all night long, ça ne fonctionne plus. Ça paraît même d’une niaiserie confondante (sans parler du spectacle offert par des septuagénaires se dandinant dans des poses sexy…). Donald Fagen, lui, n’a jamais écrit pour les adolescents américains. Et surtout, il ne s’est jamais contenté des 200 mots sur quoi on a bâti l’ensemble du rock. Sophistiqué, le mec ? Plutôt, oui. Le résultat, c’est qu’on peut écouter des chansons qui ont quarante ans d’âge sans céder à une condescendance navrée : ça tient le coup. Maxine est justement une chanson d’amour qui met en scène des adolescents, ou de très jeunes adultes. Some say that we're reckless They say we're much too young Tell us to stop before we've begun We've got to hold out till graduation Try to hang on Maxine While the world is sleeping We meet at Lincoln Mall Talk about life the meaning of it all Try to make sense of the suburban sprawl Try to hang on Maxine Mexico City is like another world Nice this year they say You'll be my senorita In jeans and pearls But first let's get off this highway We'll move up to Manhattan And fill the place with friends Drive to the coast and drive right back again One day we'll wake up, make love but 'til then Try to hang on Maxine Quand on parle d’une musique qui a accompagné notre jeunesse, on ne peut pas être objectif. Le cœur s’y met, et c’en est foutu de l’impartialité. Qu’importe ! Qu’elle soit « bonne », « grande » ou pas, c‘est aussi cette musique qui nous a fait, ça ne s’oublie pas. On l’aime comme on aime sa mère, presque. Elle nous soutient quand c’est nécessaire, nous berce, nous ravive, nous rassure. C’est une borne immatérielle à quoi on se repère, une chose qui ne change pas, quand tout se barre en brioche. Un air connu, c’est une langue familière qu’on comprend et qui ne se remplace jamais.
Alain Bashung disait qu’il ne pouvait pas entendre Be bop a Lula (version de 1956) sans pleurer. Tu comprends ça ? Passé un certain niveau d’intimité, la musique devient une forme particulière de l’amitié. On s’est trouvé, on ne se quitte plus. On profite des anniversaires pour se saluer. On y est fidèle parce que c’est ainsi, parce que c’était moi, parce que c’est elle. Un connard a écrit qu’on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve : qu’il écoute Fagen.

Non-lieux et imbéciles malheureux

Brassens a chanté pour « les imbéciles heureux qui sont nés quelque part ». Mais la véritable compassion, pour ma part, va plus encore aux imbéciles malheureux qui ne sont nés nulle part : ces gens qui n’appartiennent pas à un lieu, que rien ne rattache à un territoire, qui ont grandi ou vivent dans un non-lieu.
lotissement Non-lieu n°1243
Les non-lieux, ce sont tous ces endroits flottants, déracinés, interchangeables, posés là comme ils pourraient être ailleurs. Ces endroits qui ne sont reliés à aucun contexte, qui n’entretiennent pas de rapport particulier avec un folklore, avec des « gens du coin », avec la géographie du coin, avec rien qui fasse la spécificité d’un lieu. La personne qui habite un non-lieu n’a pas vraiment de « milieu naturel » qui la caractérise : c’est juste qu’elle réside là. Elle vit là, mais vivrait de façon exactement similaire si elle était ailleurs. Ceux-là sont « imbéciles malheureux » dans la mesure où ils n’ont pas de mérite d’être nés ici plutôt qu’ailleurs eux non plus, mais qu’en sus ils ne peuvent tirer aucune fierté ou réjouissance objectives de ce lieu de vie car il est en soi insignifiant. Toute banlieue, toute périphérie, est plus ou moins condamnée à être un « non-lieu » : une zone qui ne se définit que par rapport à sa proximité avec la « vraie » ville d’à côté - laquelle aspire et vampirise toute la vie véritable qui devrait se passer alentours. La tristesse d’être né en un tel endroit s’apparente à celle de ne pas connaître l’identité de son géniteur ; elle correspond au sentiment que l’on a lorsqu’on discute avec un banlieusard ou quelqu’un qui vit dans une zone « neutre » comme la région parisienne : impression triste que la personne, une fois qu’elle a nommé et situé géographiquement son patelin, n’a plus rien à en dire. Plus largement, les non-lieux sont aussi, au sein des villes, les « quartiers résidentiels », et leur équivalent rural les « lotissements » : ces groupements d’habitations qui poussent aux abords ou au centre de villages déjà constitués. Le lotissement retire évidemment au lieu toute histoire, toute granularité, toute texture. Les habitants du lotissement ne seront jamais des « gens du coin » : comme leur nom l’indique, on les a simplement « lotis » là parce qu’il fallait les lotir, mais leur présence ne correspond pas à un besoin ou une croissance naturelle du microcosme qui les accueille. Ils habiteront dans la commune mais n’en feront pas partie, n’y joueront pas de rôle, ils pourront travailler ailleurs, vivre sans connaître aucun voisin ni le nom du maire, se passer de toute relation sociale au sein du village... Ils sont coupés de leur milieu, à la manière des animaux d’élevage « hors-sol » : physiquement, ils sont bien sur les lieux de l’exploitation, mais ils résident en bâtiment fermé et non plus dans la cour de la ferme ; pour se nourrir, ils ne dépendent plus du fourrage des prés dans lesquels ils seraient censés paître, mais d’aliment industriel standard qu’on leur distribue, confectionné ailleurs et importé. 
non lieu pont autoroute Non-lieu n°8157
La modernité est un grand pourvoyeur de non-lieux : sous son règne, le non-lieu gagne du terrain. Car les non-lieux, ce sont aussi tous ces interstices qui entament l’espace vivable et habitable sous l’action du béton, de l’urbanisme, de « l’aménagement »… Bras d’autoroute, nœuds urbains, échangeurs, parkings, ronds-points… Additionnez tout cela et représentez-vous la surface qui a ainsi disparu pour l’homme, l’espace devenu « non-lieu », que l’on peut retrancher de la superficie réelle de la Terre. Non-lieux également sont ces endroits non spécifiques et dupliqués : toutes ces boutiques et succursales d’enseignes commerciales nationales et multinationales, qui se répètent de ville en ville. Un McDo, un Starbucks, une agence MAAF, une FNAC… sont des espaces standard strictement identiques où qu’ils se trouvent. Angers, Seattle ou Saint-Nazaire, ces boutiques s’implantent « hors-sol » et occupent l’espace vivable ; ils sont là, à la place d’autres commerces ou bâtiments qui pourraient être indépendants, véritablement caractéristiques du lieu et propres à la vie locale. Curieusement, ces endroits « déracinés », posés là, ne sont pourtant pas dénués de charme - au sens où une ruine moderne ou un paysage post-apocalyptique ont un charme. Ils ont quelque chose de fascinant et de cinématographique. Ce sont des lieux hors du temps, qui ne sont pas habités mais parcourus, des lieux où l'on se trouve sans vraiment avoir envie d’y être ni même avoir cherché à y échouer. Aire d’autoroute, ville de transit, gare routière, McDo de bord de route : on est là parce qu’on n’a pas le choix, parce que cela se trouvait sur son chemin à ce moment. Les gens y sont de passage, et apparaissent sous une lumière crue, hurlante de vide, ils apparaissent comme nus, seulement habillés de leur destination, de leur but (reprendre la route et arriver avant minuit, attraper sa correspondance, arriver avant telle heure dans telle ville pour trouver à manger...). Vous pouvez bien les observer comme une « faune locale », vous amuser à deviner leur quotidien et leurs motivations, mais l'œil sociologique est inopérant : car la vérité est que ces personnes qui arpentent les non-lieux ne sont pas plus « locales » que vous, ne font pas plus partie du paysage. Chacun est dans la même situation, ici par hasard contre son gré, ne rêvant que de repartir, et faute de pouvoir le faire, observant les autres congénères, dont vous faites partie, comme de drôles d’oiseaux effrayants. Tout le monde ici est là pour manger vite et repartir.
  Hopper station essence 
Les Etats-Unis ont évidemment le secret de cette poésie des non-lieux, de ces steppes désertiques qui bordent le monde civilisé et occidental. Sans doute parce que leur rapport au territoire est foncièrement différent du notre : là où nous achetons ou bâtissons notre maison comme si elle devait être notre tombe, eux choisissent des maisons en préfabriqué dont le souci n’est absolument pas de durer ou de se transmettre. Les gens déménagent plusieurs fois dans leur vie et l’appel du camping-car est toujours présent. 
*** Ici, vous trouvez des extraits littéraires de Pavese publiés il y a quelques temps, qui évoquent fort joliment le sentiment de « non-lieu ».

Education à balles réelles

Pour qu’une fête familiale soit réussie, un accord minimal tacite doit être passé entre les convives. Cet accord porte sur les sujets qu’il est interdit d’aborder. L’interdiction ne se fonde pas sur une précaution d’ordre moral, mais sur un constat pratique : pas moyen d’en parler sans s’engueuler. Ainsi, réunis à table, des gentlemen prudents n’aborderont jamais la question des religions, pas plus que celle de l’éducation des enfants, ni surtout celle de la conduite automobile. Une entorse à cette règle d’airain vous place mécaniquement sous la menace d’un grotesque pugilat consanguin. Il faut s’y faire : il existe des sujets dont il est simplement impossible de parler (sauf éventuellement entre personnes partageant les mêmes avis, mais il ne s’agit plus alors de ce qu’on appelle une conversation). A cette courte mais implacable liste vient désormais s’ajouter la question des armes à feu, que la récente « tuerie de Newton » a mise au goût du jour. C’est un effet curieux de la domination : les problèmes de vie quotidienne des Américains deviennent des questions de société dans des pays tiers, non concernés a priori. A chaque élection présidentielle américaine, on trouve ainsi des partisans d’Obama habitant Clermont-Ferrand, des soutiens à Romney n’ayant jamais quitté la Moselle, et des déçus du programme démocrate incapables de comprendre trois mots d’anglais. Cette curieuse forme d’aliénation se rencontre désormais pour les faits divers. Qu’un boulanger du Missouri se fasse dévaliser et ce sont les boulangers brestois qui manifestent pour réclamer plus de sécurité. Que l’obésité des texans augmente, et ce sont les bordelais qui digèrent mal. Qu’une école du Connecticut se transforme en champ de tir, et ce sont les mères françaises qui tremblent pour leurs enfants ! Dans un pays où la vente des armes est libre, on peut comprendre que certaines questions se posent, notamment celle de son contrôle. Dans un pays comme la France, le problème paraît en revanche réglé. Il ne l’est pas : à en croire certains, encore faudrait-il que la France interdise la vente des armes y compris sur le territoire des États-Unis ! Se mêler de ce qui ne nous regarde pas est décidément une passion bien française… Quoi qu’il en soit, l’affaire Newton a au moins un avantage : elle permet qu’on se dispute dans le vide, sur un sujet qui ne nous concerne pas, sur lequel nous n’avons aucune prise, et qu’on aura oublié bientôt. En attendant, tournant le dos aux offuscations franchouillardes, le Marché américain réagit : il met illico à disposition des écoliers des cartables pare-balles, parce que rien, décidément, ne saurait entraver la marche du profit. Il y a encore quelques années, seuls les plus fantaisistes comiques osaient envisager une telle mesure, plus par dérision qu'en vertu d'une anticipation sérieusement construite. Mais, si Lénine disait que là où il y a une volonté, il y a un chemin, Obama répond que là où il y a un besoin, il y a un marché... Le pragmatisme américain a longtemps fasciné les gens de droite (le pragmatisme a le double avantage de s’appuyer sur la réalité, et de ne lui attribuer aucune valeur morale : l’idéal des libéraux). Il s’illustre aujourd’hui d’une façon qui étonnera pourtant ses plus farouches partisans : le ministre de la justice d’Arizona vient en effet de proposer qu’on arme… les directeurs d’écoles, histoire de leur donner les moyens de riposter. Oui, dans un pays où l’on tire régulièrement à balles réelles sur des enfants de 8 ans, il paraît raisonnable de fournir aux directeurs d’école de quoi faire des trous dans le ventre des fauteurs de troubles. La logique américaine a au moins ici le mérite de s’accomplir dans toute sa rigueur : 1)notre loi fondamentale permet la possession d’armes (sous-entendu : nous ne modifierons pas la loi, car elle est bonne, puisque c’est la loi !) ; 2)certains s’en servent pour tuer des écoliers DONC 3)utilisons les armes contre eux. On est loin du pédagogisme à la française ! Quand on pense qu’en France, un prof a reçu 500 euros d’amende pour avoir giflé un cancre, on mesure le gouffre qui nous sépare du pays de la liberté ! Comment la mise en place de cette mesure se fera-t-elle ? Les directeurs d’école récemment armés devront évidemment suivre une formation. On les imagine sur un parcours façon parcours du combattant, devant progresser en abattant des cibles qui se dressent automatiquement face à aux. Et bien sûr, interdiction de tirer sur toutes les cibles : seules les menaçantes, figurant des agresseurs, doivent être neutralisées. Interview du professeur Callaghan, qui vient de finir son premier parcours : - Monsieur le directeur, vous avez abattu cinq cibles valides, représentant des tireurs fous, mais aussi deux cibles inoffensives, figurant des élèves de cinquième. Ne pensez-vous pas qu’il est encore imprudent de vous confier une arme ? - Pas du tout ! J’ai tout contrôlé de A à Z. Les deux cibles inoffensives, comme vous dites, étaient deux salopards qui m’avaient tagué le mur des chiottes au premier trimestre. J’en ai profité pour leur rappeler le nouveau règlement !

Après les injures, place aux excuses :

La presse gratuite pense à nos cadeaux

Issu d'un article du journal gratuit 20 minutes de ce matin.

A l'UMP, on enterre déjà le grand leader

Image terrible, image d'après l'assassinat de JFC (allias Bourh'Heur D'Urn le conquérant)... La foule des militants est en pleurs :
Comme dirait Attali : "Salut ma couille"

Le mariage nu.

A la faveur de la récente prise de pouvoir par les socialistes (ne riez pas), nous assistons à une nouvelle offensive libérale sur les mœurs : on s’y attendait. Pour l’instant, la France n’en est encore qu’à la question du mariage homo et à ses dérivés (adoption etc.). La logique est toujours la même : après avoir abandonné toute prétention à dire ce qui est bon et ce qui ne l’est pas, après avoir renoncé à toute hiérarchie morale, tout principe normatif, à toute autorité de la coutume, de la tradition, etc., au nom de quoi voudriez-vous vous opposer aux revendications nouvelles ? Au nom de quoi ? Cette question est devenu la forme la plus radicale du nihilisme moderne, en tout cas sa version la plus candide : au nom de quoi continuerions-nous à faire comme le reste de l’Humanité depuis la fin des pithécanthropes ? Contenant en elle-même sa propre réponse, cette question n’attend pas de répartie, puisqu’il est entendu que le libéralisme compte exactement pour rien les arguments qu’on pourrait lui opposer. Soutenez que le mariage concerne un homme et une femme depuis que l’institution existe, et ceci sous tous les régimes, sous toutes les latitudes et dans toutes les positions, et on vous reprochera encore de n’avoir pas de raison valable à opposer au bon vouloir des tantouzes, au droit des gouinasses, au désir d’enfant des pédoques. Évidemment, rien de libéral ne se ferait sans l’action souterraine des lobbies et autres minorités actives auxquels le pouvoir veut plaire : une clientèle, ça se bichonne. Comme je le disais plus haut, nous n’en sommes pour l’instant qu’à la question du mariage des homos. D’autres lubies viendront, d’autres-faux débats-joués-d’avance agiteront les médias, d’autres principes seront renversés et d’autres limites seront franchies dans une ambiance de fête. Le principe est simple : qu’il soit économique ou culturel, le libéralisme ne s’impose pas de limite. Il ne se reconnaît qu’une règle, celle de ne pas nuire à autrui. Règle qu’il est bien entendu impossible de suivre puisque la notion de nuisance n’est jamais définie elle-même. Il procède d’ailleurs par étapes : souvenons-nous des partisans du pacs, il y a dix ans, qui juraient que la mesure nouvelle ne remettait pas en cause le mariage. Après avoir obtenu le pacs, c'est-à-dire la dissociation entre vie commune légale et différence de sexes, il leur est beaucoup plus facile aujourd’hui de franchir le pas définitif et de se payer le mariage. Certains opposants entrevoient sans trop y croire les batailles du futur : le mariage entre un homme et un poulpe, le mariage avec des morts (on a déjà le mariage à titre posthume), le mariage entre un père et son fils, le mariage entre frère et sœurs, le mariage collectif, etc. Au nom de quoi les refuserions-nous ? En matière de libéralisme sociétal, les Etats-Unis sont en avance sur nous (on parle ici d’avancée comme on peut dire qu’une putréfaction l’est). Comme toujours, il est possible de se faire une idée assez juste du futur en observant le présent ricain. Le présent ? Voici : le conseil municipal de l’ultra-libérale San Francisco vient d’interdire la nudité en ville. Oui, les idées progressistes y sont tellement vivaces qu’une municipalité en est réduite à interdire que les gens se baladent la queue à l’air quand ils font leurs courses ! Comment, interdire que j’exhibe mes roubignoles sous le nez des passants ? Au nom de quoi ?!
Les partisans du loilpé urbain arguent bizarrement que le droit d’être nu s’apparente au droit d’expression, garanti par la Constitution américaine. Vu d'ici, on a du mal à saisir en quoi une paire de miches, même splendide, constitue une quelconque expression, mais passons. Quoi qu’il en soit, pour l’instant, devant la recrudescence de l’indécence, les élus locaux disent niet, en attendant un recours devant une juridiction plus importante, recours dont les libéraux ne se priveront pas, comme à leur habitude. Le maire du bled californien estime que les exhibitionnistes ont « dépassé les bornes », argument moral incompréhensible pour un libéral, pour qui les bornes n’ont pas à être fixées selon l’opinion privée d’un mec, fût-il maire. On verra ce que cette affaire donnera. Lors du débat sur l’interdiction du voile intégral dans l’espace public, certains avaient justement rappelé qu’on ne peut pas se vêtir « comme on veut » en France, mais selon une tradition de règles parfois non écrites. Aussitôt, le kit argumentatif libéral fut dégainé : au nom de quoi m’interdirait on de voiler mon visage, puisque ce faisant, je ne dérange personne, et n’oblige personne à faire de même ? A cet égard, pour faire comprendre la vie aux extrémistes, il a été rappelé que si on interdisait le voile absolu, il n’était pas non plus légal de se promener tout nu dans les rues. Au final, le législateur n’a pas eu le courage de s’appuyer sur une tradition pour interdire la burqua. Il a simplement rappelé qu’utiliser l’espace public suppose qu’on puisse vous y reconnaître, que les forces de l’ordre puissent vous identifier. Ainsi, en faisant référence à une obligation sécuritaire plutôt qu’à une série de traditions de la vie en commun, la France a entériné le fait que ces traditions n’ont plus aucune autorité. Qu’un groupe quelconque les attaque, et c’en est fait d’elles. Avis aux nudistes.

La presse française sauve l'honneur

C’est encore une fois la lecture des journaux qui nous donne la vision la plus exacte des événements. Parmi eux, nul mieux que le Figaro n’est susceptible de résumer la vigueur et l’impartialité des analyses, le froideur chirurgicale des faits. Les faits ! Rien que les faits ! Lisons le Figaro : qu’y apprend-on ? Encore une fois (et les hommes de bonne volonté s’affligent en le constatant), une organisation surarmée, disposant de moyens sans limite, forte de millions d’hommes et d’un réseau international de pays partenaires, s’attaque à un pays quasi désarmé. Encore une fois, la disproportion des forces en présence touche à l’obscène et encore une fois, nous y assistons impuissants. Encore une fois, Gaza agresse son pacifique voisin, tandis que les larmes coulent en fleuves amers sur les joues roses des innocents. Copie d'écran

Leur pub est aussi bonne que leurs sandwichs

Et ce n'est pas peu dire :
Coucou Alien, tu veux voir ma bite ?

Téléfilms Historiques Français

Parmi les agacements de la vie, il y a ces téléfilms historiques que nous sert de temps à autres France Télévisions, qui commencent par se présenter comme le fruit d'un travail sérieux (nous sommes le service public), insistent dans leur bande-annonce sur la fidélité de la reconstitution, prétendent « enfin lever le rideau sur une période trouble », pour au final ne valoir guère mieux qu’une bluette, un Terre indigo transposé dans un contexte historique… Et tous les poncifs qu'on croyait déjà connaître sont visités un par un. Dans cette catégorie, la palme revient au téléfilm sur l’Algérie, passé il y a quelques années, où les pieds noirs étaient infâmes, invectivant leur boniche algérienne et ne pouvant prononcer le mot « aRRRabe » sans grimacer, tandis que le héros, bel et jeune officier, s’étant engagé dans l’aventure de l’Algérie française par idéal avec le rêve d'un monde nouveau à bâtir où ouvriers des deux peuples se donneraient la main, tombait de haut en découvrant l’affreuse réalité de la Kolonization
Le plus stupide en fin de compte, dans ces films de mauvaise facture, le plus antihistorique, c’est la figure du héros, qui a toujours l’heur et le bon goût de réfléchir en homme de notre temps. Blum, Zola, Camus, Jean Moulin… Quelle que soit la période, ce héros a toujours l’Histoire avec lui. Il a été à bonne école, contrairement à toute son époque ! Il agit comme s’il avait la science de ce qui s’est finalement passé.
  • Si c'est un officier de 14-18, il voit dans la guerre une boucherie, et dans les Allemands d’en face de pauvres bougres qui n’ont rien demandé. Il est militaire, mais le nationalisme lui semble une belle connerie.
  • Si c'est un jeune homme sous l'Occupation, il n’y réfléchit pas à deux fois. Pas une seconde il ne doute de l'issue de la guerre : ce ne sont que quelques années à tenir avant que les Américains débarquent, ça vaut carrément le coup de prendre le maquis !
  • Si le héros est une femme du XIXème siècle, elle est bien entendu libérée avant l'heure : outrée qu’on n’en soit pas encore aux 35 heures, suffoquée par la morale étriquée de ses amies bourgeoises, au fond dans sa tête c'est une femme des années 80...
Et ainsi défile la ribambelle de héros, anachroniques, complètement extérieurs à leur époque, qui ont la Vérité avec eux et qui l’ont seuls, seuls s’il ne se trouvait une petite Mélanie Doutey à leurs côtés, infirmière, institutrice, pour les encourager et leur confirmer qu’ils s’apprêtent à devenir de grands personnages de l’Histoire.
« Bonjour. Nous avons raison. »
Ce qui est profondément faux dans cette approche, c’est de ne pas comprendre que telle ou telle opinion qui a cours aujourd’hui puisse être anthropologiquement impossible à avoir à une autre époque. Ce qui est fallacieux est cette façon d’aplanir la complexité du passé, de la gommer sous l’évidence des positions morales d’aujourd’hui. Ces téléfilms pensent peut-être honorer les personnages dont ils traitent en leur donnant raison contre tous, mais ils les amoindrissent au contraire : en laissant entendre que c’était là ce qu’il fallait faire, que c’était la seule posture à adopter pour un homme digne tant soit peu, ils ôtent aux actions de ces hommes leur force, à leurs choix leur difficulté, à leurs jugements leur singularité, aux événements dans lesquels ils étaient plongés leur caractère chaotique... En fin de compte ils ôtent à l’Histoire tout son vertige et tout son sel.
Curieusement, l’attitude moraliste sur l’Histoire devrait s’estomper avec le temps et la distance, évoluer vers une plus grande sérénité, mais à travers ce genre de téléfilms elle fait chemin inverse : sur des évènements parfois vieux d’un siècle, elle pointe du doigt, distribue les bons et mauvais points, oppose de façon plus implacable les parties d’alors… Elle condamne à nouveau, déforme et exagère, appelant ainsi les contradicteurs potentiels à exagérer à leur tour dans l’autre sens... C'est ainsi qu'on n'y voit pas nécessairement plus clair et que la dispute peut continuer.

Bonne nouvelle :

Hip hip Nisrine

Le CGB en rêvait, Nisrine Zaïbi l'a fait !! Nisrine merci ! touslessocialistes_1 par Culturalgangbang

Exclu CGB : Jimmy Savile aurait aussi empoisonné une jeune fille

Le CGB tire les cartes à la France

Le CGB, cartes sur table
Le CGB, inquiet pour la situation du pays est allé consulter un oracle, voire... un voyant. 
En exclusivité mondiale, le Culturalgangbang est de retour du Futur...
L’ambiance est obscure, tamisée. De faibles éclairages aux quatre coins de la pièce. Au sol, le tapis est épais. Sous mon cul, un fauteuil confortable. Lui me fait face. Entre nous, il y a un guéridon.
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